Recrutement : quelle(s) relation(s) entre employeurs et candidat.e.s pendant la crise sanitaire du Covid-19 ?
Article mis à jour le 29/10/2020
La crise sanitaire actuelle impacte fortement les relations entre les employeurs et leurs salarié.e.s, mais qu’en est-il des relations entre l’employeur et les candidat.e.s en cours de processus de recrutement ou récemment embauché.e.s ? Nous avons souhaité répondre aux interrogations actuelles de nos client.e.s de manière claire et pratique tout en ayant une vision plus long terme. Quelles seront les implications de ces décisions demain ?
Pour ce faire, nous nous sommes penchés sur ce sujet avec Maitre Ménage, Avocat associé spécialisé en contentieux et Maitre Buannic, Avocate associée spécialisée en Droit du Travail exerçant tous les deux au sein du cabinet Fidal Rennes. Voici leurs réponses et conseils.
Quelle valeur pour une promesse d’embauche adressée à un.e candidat.e avant le confinement ?
« Il faut commencer par rappeler que la validité de la promesse d’embauche dépend de la manière dont elle a été rédigée. Elle doit contenir des éléments précis comme la date d’embauche, le salaire ainsi que les missions prévues pour le poste.
- Une promesse d’embauche engage l’employeur qui ne pourra se rétracter unilatéralement.
- En revanche, si les écrits émanant de l’employeur requièrent une réponse du.de la salarié.e, par exemple un délai de réflexion et que l’offre n’a pas reçu de réponse, l’employeur a la possibilité de se rétracter. Dans le doute, il est indispensable de faire analyser les échanges ou le document par un cabinet d’avocats.
Certains employeurs pourraient utiliser la situation actuelle exceptionnelle pour justifier le retrait d’une promesse d’embauche, cette démarche est risquée. Face aux juges, il n’y a pas de certitude que cela puisse aboutir. De plus, le.la candidat.e pourra faire valoir un préjudice non négligeable s’il a déménagé pour le poste ou démissionné par exemple. Un risque qui peut coûter cher à l’employeur. Si la volonté de rompre est sans alternatives, cela ne pourra se faire qu’en mettant en place un accord entre les deux parties, un arrangement financier écrit est bien entendu conseillé.
Que faire si le contrat est déjà signé mais que le.la salarié.e n’a pas encore pris son poste ? Décaler la prise de poste est-il possible ?
Dans l’hypothèse d’un contrat de travail signé comprenant une date de prise de poste claire pour les deux parties, le respect de cet engagement est obligatoire, la situation de crise ne bouleverse pas la relation contractuelle en matière d’embauche.
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- Si le.la salarié.e ne se présente pas à la date prévue pour sa prise de poste, il sera en faute et s’expose à des sanctions disciplinaires.
- L’employeur et le.la salarié.e peuvent se mettre d’accord pour décaler la prise de poste sous forme d’un échange écrit suffisamment clair, par mail par exemple. Cette décision ne pourra en aucun cas être prise de manière unilatérale.
Quelles sont les obligations de l’employeur vis-à-vis des nouveaux arrivants, en termes d’intégration notamment ?
L’employeur doit respecter le droit commun qui implique une obligation d’information. Dans ce contexte de crise, cette obligation d’information est renforcée.
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- Dans le cas où l’activité se poursuit, le.la salarié.e doit être informé.e par la Direction ou les Ressources Humaines des modalités concernant le télétravail, si il est mis en place, en vérifiant que tous les outils sont à sa disposition.
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- Si le travail se poursuit sur le lieu de travail habituel, la formation sur les règles de sécurité et les mesures exceptionnelles mises en place est obligatoire.
- Si l’activité de la société est arrêtée et les salariés placés en chômage partiel, le.la nouveau.elle salarié.e doit obligatoirement en être informé.e.
Il parait souhaitable que ces nouvelles modalités de travail soient communiquées au.à la salarié.e quelques jours avant sa prise de poste. Il est judicieux de prévoir un document, une « fiche d’entrée en fonction » qui formalise ce passage d’information, incluant aussi les gestes barrières et les mesures à prendre que le.la salarié.e pourra signer afin de prouver qu’il.elle a bien bénéficié de toutes les informations obligatoires.
Ajoutons que compte tenu des circonstances, le.la salarié.e entrant.e doit se plier aux conditions de travail prévues, il.elle ne peut pas refuser d’emblée le télétravail par exemple.
Le.la salarié.e bénéficie-t-il.elle d’aides entre une démission et une nouvelle prise de poste ? Dans la situation où la prise de poste serait décalée par exemple.
A priori, sauf en cas de démission légitime pour suivre son conjoint notamment, le.la salarié.e ne bénéficie pas d’aide particulière pendant ce laps de temps. Il s’agit de la règle de droit commun.
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- Dans le cas où la prise de poste serait décalée, cela doit résulter d’un accord entre les deux parties, rien ne peut être fait de manière unilatérale. Le cas d’un.e salarié.e dans l’incapacité de déménager étant donné les circonstances peut se présenter, dans ce cas il faudra trouver la meilleure solution possible en bonne intelligence entre les deux parties.
- Si l’employeur est tenté de décaler la prise de poste car il subit une baisse significative de son activité, il est plutôt conseillé et moins risqué de maintenir la date de prise de fonction et d’intégrer ce.tte nouvel.le arrivant.e au dispositif du chômage partiel prévu.
La crise actuelle est-elle un motif de rupture anticipée des CDD et des contrats d’intérim ?
La situation exceptionnelle que nous vivons actuellement n’est pas un motif en soit pour résilier les contrats quels qu’ils soient, on privilégie une logique de continuité des emplois.
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- Les personnes en CDD sont salariées de l’entreprise au même titre que les salariés en CDI, en cas de baisse d’activité ou d’absence d’activité, ils peuvent bénéficier du dispositif de chômage partiel.
- Les entreprises de travail temporaires pourront également faire bénéficier leurs salarié.es temporaires de ce dispositif si ils.elles sont concernées au regard de leur activité au sein de l’entreprise utilisatrice.
Qu’en est-il du sort de la période d’essai pendant le confinement ?
Il faut rappeler que la période d’essai résulte d’un écrit, il faut donc être au préalable certain que la période d’essai est valable et actée au sein du contrat de travail. Par exemple, une promesse d’embauche qui contiendrait une période d’essai ne sera a priori pas suffisante.
Par principe, la période d’essai permet de tester le salarié. En cas de chômage partiel, on ne peut pas évaluer le travail du.de la salarié.e, la période d’essai est donc suspendue. Si le temps de travail est effectif ou simplement réduit, la période d’essai court.
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- La possibilité de droit commun de rompre de la période d’essai est toujours possible mais il s’agit de faire attention à ne pas tomber dans une rupture qui pourrait être qualifiée d’abusive par les juges.
- Si l’employeur n’est pas satisfait du travail effectué pendant la période d’essai, il convient de respecter les règles prévues par le droit du travail. Même s’il n’a pas à justifier cette rupture, il est recommandé par le cabinet Fidal de conserver des éléments de preuve de cette « non-satisfaction » (rapport du.de.la salarié.e, éléments objectifs) qui pourraient être utiles en cas de litige.
Est-ce qu’un.e candidat.e intégré.e, alors que l’entreprise a pris des mesures d’arrêt d’activité (chômage partiel, congés pour garde d’enfant), peut être placé.e au même régime dès son premier jour ?
La réponse est oui : les mesures de type « chômage partiel » ne sont pas subordonnées à une ancienneté du.de la salarié.e et sont donc applicables dès le premier jour de l’entrée du.de la salariée dans la société. L’information du.de la nouvel.elle arrivant.e sur ces mesures est cependant indispensable.
Les congés maladie et congés pour garde d’enfants notamment ne sont plus soumis à une condition d’ancienneté en raison d’une ordonnance spécifique prise par le pouvoir exécutif. Le.la salarié.e peut donc en bénéficier dès son arrivée. »
Dans tous les cas, si vous avez la moindre question ou un doute quant à la gestion de vos salarié.e.s pendant cette crise sanitaire, contactez votre cabinet juridique ou votre cabinet de conseil RH.
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